L'enfance

Durant des siècles, la vie de nos aïeux ruraux n'a guère évolué et cette description de l'enfance peut tout aussi bien s'appliquer au Moyen-Age qu'à la fin du 19ème, voire début du 20ème siècle.

La vie rurale offre certes aux enfants les plaisirs des jeux dans la nature, l'agrément d'un air et d'une eau moins pollués qu'en ville, mais elle ne constitue pas pour autant un domaine protégé. La maison rurale n'est pas moins dangereuse que la maison urbaine, avec son foyer ouvert, sans cheminée, dans lequel trébuchent les enfants, quand ils ne font pas tomber en courant les pots à cuire pleins d'eau bouillante. Par la porte toujours ouverte vont et viennent les animaux domestiques, au rang desquels les porcs, souvent responsables de graves morsures. Les enfants risquent la noyade dans le bief des moulins.


Les accidents sont particulièrement nombreux le matin, lorsque la mère s'absente pour la corvée d'eau et pour aller nourrir les animaux. Les grands travaux des champs, entre mai et août, sont particulièrement propices aux catastrophes, quand les deux parents sont au travail hors de la ferme et qu'ils ne peuvent plus surveiller leur progéniture du coin de l'œil. D'une façon générale, les enfants sont laissés libres de se promener tout seuls dès l'âge de 3 à 4 ans. Certains se noient dans la mare ou dans le puits, d'autres se perdent en forêt…

Contrairement aux enfants des villes, ceux des campagnes n'ont pas de berceau, ou rarement, si bien qu'ils tombent du haut lit parental ou du hamac accroché au-dessus, ou se retrouvent à demi étouffés entre la couette (le matelas) et la courtepointe quand ils dorment avec leurs parents. Sur le sol de terre battue, les enfants trouvent mille petits objets avec lesquels ils se blessent : épingles, anneaux, fusaïoles tombées des fuseaux de filage de leur mère ; ils mangent de la terre, des charbons de bois ramassés sur le sol. Les aînés ont le devoir d'empêcher les bébés de commettre de telles bêtises, mais, dans la relative obscurité de maisons sombres et enfumées, quasi dépourvues de fenêtres pour préserver la température intérieure, c'est là chose difficile. Eux-mêmes ne sont pas à l'abri des accidents domestiques : les chutes de l'échelle dans la grange sont monnaie courante. C'est pourquoi les parents essaient d'emmener leurs enfants avec eux dans leurs activités laborieuses.

Quelques textes agronomiques et des dizaines d'images peintes dans les manuscrits détaillent les charges qui incombent aux enfants dans le monde paysan. Aux plus petits sont confiées les tâches ingrates, mais sans danger ni fatigue excessive : celles du petit jardinage, de la chasse aux insectes (hannetons), aux batraciens des jardins et aux oiseaux, qui viennent picorer les semences fraîchement dispersées dans les billons. Postés dans des cahutes au milieu des champs, ils sont chargés d'actionner des clochettes accrochées à des fils, sillonnant le terrain dès que les oiseaux se posent. À l'aide d'une fronde, ils suivent le semeur et tuent les corbeaux qui viennent lui chiper le grain à peine semé. Ils sont également chargés de grimper aux arbres pour cueillir les petits fruits, amandes, cerises ou olives. Ils suivent leur père dans ses travaux saisonniers (tonte des moutons, vendange), à la fois pour l'aider et pour apprendre les gestes du métier, et vont avec lui au marché où ils s'initient aux techniques de la vente des produits.

Dès l'âge de 8 à 10 ans, les garçons accompagnent leur père aux champs au moment des labours ; ils l'aident à guider le bœuf pour l'obliger à aller droit. Ce travail ne va pas sans fatigue ni sans dangers : la glaise est lourde et collante sous les pieds, les enfants glissent, le père ne peut arrêter le bœuf et le soc de la charrue laboure leurs jambes, les handicapant à jamais. La garde des troupeaux, qui débute au même âge, est tout aussi génératrice d'accidents. En plaine, il se trouve toujours un passant secourable, mais, isolés dans la montagne, les petits bergers blessés ne survivent pas à une chute dans un ravin.

Les filles sont davantage à l'abri : leurs tâches domestiques et agricoles sont circonscrites autour de la maison, dans le poulailler, le jardin potager. Elles font la vaisselle, rangent la maison, nourrissent les volailles, ramassent les salades et les fruits, et s'occupent des bébés.

Merci à mon amie Sylvaine, passionnée par le Moyen-Age

Créer un site internet avec e-monsite - Signaler un contenu illicite sur ce site

×